à Rafael Cancel Miranda - menotté au mur – pénitencier de Marion
à Frank «Big Black» Smith – et tous ceux de Attica
à Sekou Odinga - cendrier de ses tortionnaires
à Alejandrina Torres – prison de Phoenix, Arizona - violentée par le poing de son gardien
à Susan Rosenberg - Lexington - lumière toutes les 20 minutes – des mois sans dormir
aux femmes violées dans la prison d’état à Georgia et dans la fedérale de Dublin
aux torturés dans les cages de Pelican Bay, Florence, Guantanamo, Abu Graib…
aux torturés de Bolzaneto – de l’Asinara – de toutes les préfectures et les geôles
aux desaparecidos
aux condamnés à mort
je parle des détenus
du désir qui raconte les cicatrices
ni miennes ni de mon corps
je parle de mes gens
maintenant ici même il fait chaud
et d’autres corbeaux volent prévenus
par une langue cruelle de mensonge
entre déchets et fantômes de misère violente
maintenant ici même il fait chaud
et le nord qui glisse plus au nord
rend sud tous nos scénarios
tandis que le sud reste immobile sous le soleil
en portant le risque de couleurs coupables de vie
c’est un feu continu
une hypothèse humaine décisive
qui rêve et qui renie ses rêves
il vient vers l'Europe
devant ton fauteil confortable
ta télécommande occidentale
rapidement accablée implosée
dans ce tourbillon interne de la digestion
nous sommes l’éternité de doutes
rescapés contrevent
nous passons comme un troupeau
entre deux piliers philosophiques de pensée fétiche et nihiliste
qui emprisonne les instincts antagonistes
dans ses enclos de régularité dans l'ordre prévu
comme des animaux la peau d’autres ennemis
pour ne pas courir le risque d’infections
et nous n’achetons jamais assez
je proviens du monde
l’ange maigrit à occident
déjà trop souvent sans un paradis
juste la résistance
ou sauter ou rester
en acceptant les désavantages des limites
hors de notre chant
je porte encore l’accent qui résiste à l’usage
je l’écris sur ma voix
ce dire imparfait et alors que je parle
chaque mot tombe sur le dit précédent
comme un soleil qui brûle enflammant de nausée littéraire
des terres de sécheresse
plein soleil de mes rêves condamnés
à la mathématique des multiplications
donc le cœur réclame du rythme
encore des sensations d'hérésie
et s’alimente et il trouve ses veines
se répresente il apparaît encore tigre
anarchique lueur souffle anarchique qui se tait jamais
au contraire il transporte en hurlant son défi
éternel bruyant avec sa fin absolue
c’est la charge de victimes qu’il porte en blasphémant
écoute, poésie…
je dis pesant ce haut vol aux ailes gênées
et sans arrêt dans le cauchemar présent
sur les montagnes des restes du surplus
satiété rebuts humains ordures
dépotoirs que l’histoire met en place
à qui nous écrivons cette rage?
comme pourrons-nous vous parler plus d’amour
si nous ne savons même pas demander
pardon aux enfants?
et je n’ai pas un dieu qui bénisse
l'ambitieux suicide américain
dans cette civilisation definitive
hurlante de race supérieure
je dédie les racines aux brins d’herbe
et l’amour jamais fait aux detenus
mais dans un sens plus large de toutes les prisons
et en même temps j’écris sur les barreaux de la cage
une espérance à retardement
et si l'âme a envie d’en nommer les doutes
si ça l’intéresse… qu’elle prenne…
Alberto Masala. Sarde, il vit à Bologne. Traduit dans différents pays européens et aux Etats-Unis. Il travaille (surtout à des concerts) avec des artistes et des musiciens de différentes origines et de disciplines diverses. Dans les dernières années, il s’est rendu souvent en France, à Paris, où il a été récemment invité au marché de la poésie, au Palais de Tokyo, et au Centre National des Lettres. Publications : « all’infinto » (ed. d’art avec Anton Roca) pour Joseph Beuys avec R. Barbanti, L. Bolognesi, A. Roca (ed. Monyanari), « Mediterranea » avec des photos de Massimo Golfieri(Il Maestrale), « proveniamo da estremi » avec Fabiola Ledda et Antonio Are (livre + cd) « TALIBAN, i trentadue precetti per le donne” (en Italie, aux Etats-Unis et en France), “Nella casa del Boia” (in the executionner’s house, S. Francisco, Etats-Unis). “geometrie di libertà”(ZONA). Dans plusieurs récits et antologie, en Italie et à l’étranger il a soigné comme traducteur: “Love and Politics” (de l’anglais éditions StampAlternativa) de Judith Malina, “Nierika, o le memorie del quinto sole” (du français, éditions il Maestrale) de Serge Pey, “l’ultima parola, in viaggio nel Jazz” de Jack Kerouac ( de l’anglais, éditions Il Maestrale) et, avec G.Dettori et M. Fois, « poesie complete » de Peppinu Mereu (du sarde, aux soins de Giancarlo Porcu, éditions il Maestrale). Parmi ses participations sur RAI Radio 3, il s’est occupé des séries sur Tom Waits et Allen Ginsberg.